Entrée de Tory

L'entrée de Tory, petit village perdu dans les grandes plaines des Trolls constitué d'un amas de maisons, boutiques est constituée de quatre gardes trolls disposés par paire, gardant l'entrée de la rue principale du village. Sur le côté, on remarque un Troll magicien à parure impressionante, rayonnante de magie, qui est en fait le recenseur des aventuriers venant à ce village troll. Il est conseillé de lui parler pour obtenir quelques privilèges en échange d'une simple ... allégeance. "Aventuriers, ceci est pour vous : faites attention à ce que vous mettez en jeu ...", disait ce même recenseur, à qui on a demandé de faire prendre conscience aux aventuriers de l'ampleur de leur choix.

*Tchof tchof puf tchof tchof puf tchof tchof tchof puf schlip tchof tchof puf*

Voilà à peu près le bruit que je dégage en marchant, alternant de grandes enjambées, une bouffée de fumée, et tournant de temps à autre une page de mon bréviaire.
Je n'en ai pas vraiment besoin: à force de l'avoir lu, lu et relu, je connais quasiment chaque passage par cœur, depuis les sacrements jusque dans les jours pieux, mais je parcours tout de même les pages d'un œil distrait, observant de l'autre le paysage, tout en marchant à enjambées régulières, le dos droit, la démarche paisible.
De temps à autres, je relâche une bouffée de tabac de voyage qui se perd dans le ciel en des panaches paresseux.
Avec ma grande taille et mes nuages de fumée, de loin, on pourrait me prendre pour un de ces trains que construisent les nains. Cette pensée m'arrache un sourire en coin tandis que je murmure "Tchou tchou" en dégageant deux autres petites fumerolles.
A part ça, rien: le voyage le plus paisible qu'on puisse désirer, et ça me convient parfaitement. J'ai comme l'intuition que les choses vont se bousculer aussitôt que je serai arrivé à Tory, et je ne crache pas sur ce moment de tranquillité et de silence.

Tout d'un coup, un détail... ou plutôt un ensemble de détails, me saute aux yeux. Insignifiant dans sa forme, mais qui veut tout dire pour moi: une irrégularité dans les contours de l'environnement, un soupçon de différence dans les coloris, une différence quasi-imperceptible dans la flore...
C'est un village Troll, et habilement mis à l'écart des regards, comme tout bon village Troll.
Ça ne demande pas beaucoup d'efforts: un placement intelligent, un agencement bien pensé, une organisation soignée... et voilà, à peu près les trois-quarts des non-Trolls passent sans même le remarquer à cette distance. La technologie Troll dans toute sa splendeur: simple, bien pensé, efficace, comme je l'aime... bon, n'exagérons pas, il ne s'agit quand même pas d'un camouflage tactique d'une efficacité redoutable, mais quand même, il est loin de se remarquer du premier coup d'oeil.
Aussitôt que je m'en aperçois, j'ai comme un pincement au cœur: cette période d'une demi-décennie de solitude est derrière moi désormais, et bien qu'elle fût pesante par moments, je ne la dépasse pas sans un certain sentiment de nostalgie... ça fait tant de temps que je n'ai pas parlé, je ne suis même plus sûr de savoir quelle sera ma voix.

En approchant, je referme mon bréviaire dans un claquement familier avant de le ranger dans mon sac et de m'avancer. Tout en me rapprochant, je distingue plus clairement l'entrée de Tory: deux fois feux gardes, disposés en paires bien établies... un ordre qui fait plaisir à voir.
En revanche, sur le côté se trouve un autre Troll qui détonne de ce quatuor: habillé avec une telle profusion d'atours que je ne peux m'empêcher de fustiger intérieurement ce faste, il irradie d'une telle puissance magique que même moi, pourtant non-initié aux arts profanes, je peux la sentir se dégager jusqu'à moi.
(Hum... assurément la personne en charge ici. Pas le genre dont il faudrait se faire un ennemi... mais bon, on verra bien.)
Sans laisser transparaître aucune émotion, je me dirige vers le magicien en absorbant les dernières parcelles de tabac qui restent dans ma pipe avant de curer ce qui est désormais des cendres froides avec un bout de bois prélevé sur un buisson. Une fois que je la juge dans un état de propreté acceptable, je la range dans ma poche et envoie balader mon cure-pipe.
Goûtant les derniers nuages âcres du tabac, je les expulse d'une grande inspiration qui répand une nuée tentaculaire dans les airs, avant de déclarer au troll:

"Bonjour, je me nomme Loemnkhyuto... Leto pour plus de convenance.
J'ai reçu une formation religieuse et militaire accomplie, et sais manier le glaive en portant l'armure aussi bien qu'utiliser la magie de la Lumière.
Je suis venu m'inscrire. Si vous avez des question ou des conditions, je suis prêt à y répondre."

Après tout ce temps, ma voix était assez rocailleuse, mais sa douceur m'étonne... quoi qu'il en soit, je lui ai dit ce qu'il y avait à dire: pas besoin d'en rajouter, il n'est pas là pour entendre des longs discours.

Le Troll magicien lève un sourcil :

"Vous êtes venu vous ... inscrire ? Je pense que vous parlez bien du statut d'aventurier, tout du moins l'espère, au vu de vos capacités ..."

Il t'examine :

"Tout ceci est, ma foi, un peu rapide ... D'abord, expliquons un petit peu le tout ... Un aventurier au service des Trolls peut être réquisitionné n'importe quand. Il a également le devoir de progresser dans un groupe afin de bénéficier d'une puissance considérable pour être utile au territoire qui saura s'en servir pour gagner des batailles. Ceci sont les inconvénients."

Il sourit :

"Mais après viennent les avantages ... Ou plutôt, généralement, avant ... Des tas d'avantages matériels vous seront proposés car partout les listes d'aventuriers circulent et les Trolls sauront ainsi - ceux qui sont liés au territoire et à sa défense, généralement - que vous les servez, et que vous vous êtes engagé. Ainsi, je vous donnerai, si vous vous ... "inscrivez", comme vous dites, déjà, vos premiers avantages : j'ai ici l'équipement nécessaire aux Trolls se faisant recenser."

(Bien sûr que je suis venu m'inscrire en tant qu'aventurier... si j'expose mes capacités de combattant, ce n'est pas pour venir exercer mes talents inexistants de cuistot.)

Lorsqu'il parle, je me contente de l'écouter sans un mot, me contentant de hocher la tête de temps à autre... si je ne lui ai pas demandé d'explications, c'est que je sais tout ça, je ne suis pas venu sur un coup de tête!
Un moment, j'ai envie de l'interrompre: mais je me tais. Je sais être patient, et il faut bien qu'il soit sûr que je suis au courant de toutes les implications d'être aventurier.

Lorsqu'il a fini, je prends la parole.
"Je suis conscient de tout ça, pas d'inquiétude. Je suis prêt à défendre mon foyer, je ne suis pas un lâche, et j'ai réfléchi longtemps avant de venir pour devenir aventurier. Ce n'est pas avec moi que vous aurez des problèmes.
S'il faut prêter serment, je le ferai. S"il faut rejoindre un groupe, je le ferai... dans la mesure où ce groupe sera compétent bien sûr."

Je le fixe sans rien dire d'autre. Après cinq ans de silence, parler me fait une drôle d'impression... j'imagine que je m'y réhabituerai rapidement.
Est-ce que les gens parlent toujours autant? Peut être qu'il faudra que je m'habitue à être plus loquace moi aussi... après tout, ce n'est pas parce que je suis calme que je dois être un asocial convaincu.
D'ailleurs, je n'ai même pas répondu à sa sourire... j'étire donc mes lèvres, ce qui réveille mes zygomatiques longtemps laissées en sommeil. Je dois avoir un drôle d'air. J'espère que ma trombine n'a pas l'air d'une grimace, il va se demander ce que je peux bien lui vouloir.

Le recenseur déclare alors :

"Eh bien, dans ce cas ... Prononcez le serment qui vous semble approprié."

Il sourit :

"Les Trolls se laissent une grande marge de manoeuvre, et c'est aussi un moyen de vérifier les capacités intellectuelles qui se doivent être un minimum élevées, qui que soit le Troll."

Avec patience et ironie, son regard narquois et malin se plante dans tes yeux.

Hmm... j'aime les défis, et les propos qu'il tient à mon égard sonnent comme tel à mes oreilles. Prononcer un serment n'est pas une chose à prendre à la légère. Pas pour moi tout du moins: quelqu'un qui rompt un serment est en ce qui me concerne un homme mort. D'une voix solennelle, je prononce donc:

"Moi, Leto, promets au nom de ce que j'ai de plus sacré de défendre ma terre, et que mes ennemis mourront sous mes coups."

Peut-être un peu bref pour un serment, mais après tout, si j'étais là pour faire de longs discours, je serais un Barde, pas un Croisé. J'ai simplement fait dans la concision tout en lui montrant que je ne plaisantais pas.
Et les capacités intellectuelles hein? S'il croit que je suis né de la dernière pluie, je vais le détromper bien vite: j'en ai autant dans le cerveau que dans les muscles, et il n'est aucun problème, qu'il fût matériel ou spirituel que je n'eus su résoudre... par tous les moyens nécessaires.

"S'il faut juger de mon intelligence, alors testez moi autant que vous voudrez... mais d'abord, je vais vous donner la pareille en prévision:
Je suis dans l'étang et au fond du jardin. J'apparais deux fois dans l'année: une fois la nuit, mais jamais le jour. Que suis-je?"

Lui rendant l'expression dont il m'a gratifiée, je le fixe sans me départir de mon visage impassible: on va voir si lui, qui prétend pouvoir jauger de nouveaux arrivants, est si malin que ça.

Le Troll guette avec attention le discours que tu prononces peu après.

Tu devines par son hochement de tête que c'est fait.

En entendant ton énigme, le Troll sourit :

"Et j'encadre la plus banale des négations ... Pas mauvais, pas mauvais ..."

Il reprend un air sérieux :

"Bon. Te voilà recensé."

Il écrit ton nom sur une feuille et donne un ordre bref à un garde en la lui donnant. Celui-ci s'en va rapidement.

Il revient sans la feuille, mais avec ...

"Voici pour toi une épée à deux mains troll, une armure de mailles de croisé troll, un sac et 10 pièces de bronze. Ceci peut faire partie des privilèges que tu as maintenant, étant recensé."

Pas mal en effet, pour lui aussi: on dirait que ce magicien n'a pas volé la réputation d'érudit que les lanceurs de sorts tels que lui ont d'ordinaire.

(Me voilà donc recensé. Une étape supplémentaire dans ma vie j'imagine.)

Tandis que le garde va remplir son office, je lisse la barbichette qui orne mon menton d'un air pensif tout en empochant distraitement les dix pièces de bronze. Jusqu'ici, je n'ai jamais u de possession matérielle à proprement parler à part mes tabacs et ma pipe, et bien entendu mon bréviaire. Après cinq ans consacrés à ce vœu de pauvreté, il faudra que je me réhabitue également à prendre soin de mon matériel... cinq ans de pacifisme aussi. J'espère que le frisson du combat me reviendra vite, je n'ai pas envie de passer pour une bleusaille.

("Cœur de pierre"... sacré surnom qu'on m'avait donné!)

Lorsque le garde revient avec le matériel, mes yeux scintillent à la vue de ces instruments de bataille. Il ne fait aucun doute: je n'ai pas oublié comment me battre. Je parcours la maille forgée avec soi, insérant mes ongles dans les interstices avec fascination. J'enfile ensuite cette fabuleuse seconde peau de métal avec délice. Je me sens invincible, je me sens puissant, je me sens... un Croisé, tout bonnement. Je fais quelques gestes pour mettre mon corps en phase avec cette armure, avant de reporter mon attention sur l'épée... mon glaive désormais.
J'attrape la garde avec un frisson d'excitation qui me secoue tout le corps. Mon arme de choix, je n'ai pas oublié comment te manier!
Pour m'en assurer, je la soulève d'un moulinet adroit, avant de l'empoigner à deux mains, la faisant siffler dans l'air comme un tourbillon de mort propre. Elle n'est pas d'aussi bonne qualité que celle que j'avais au Camp, mais elle fera très bien l'affaire entre mes mains expertes.

Terminant mon enchaînement, je m'apprête à ranger mon arme quand je vois un petit lézard sortir du village pour aller se réfugier dans un rocher aux alentours.

(Voyons voir si je suis toujours aussi précis.) pense-je avec un sourire en coin.

J'abats alors mon épée sur le lézard, lui tranchant la queue net avec un bruit sourd sur le sol. Tandis qu'il s'échappe de toute la force de ses petites pattes, je passe mes yeux le long de la lame: comme il se devait, pas une goutte de sang ni une trace de dégradation. Je suis paré: rien ne peut m'arrêter désormais.
Je mets mon arme au fourreau dans mon dos, l'expression d'une quiétude satisfaite peinte sur mon visage.

"Parfait." je commente avant d'ajouter: "Par quoi commence un recensé maintenant?"

Nullement impressionné, mais plutôt sceptique, le recenseur t'indique du bras une rue.

"La prochaine étape, c'est le repos ! J'imagine que le voyage a dû être long ... On verra demain pour ce qui est de votre apprentissage ... Je me chargerai de vous trouver quoi faire, je tiens à former correctement les aventuriers et surtout ... rapidement."

Et il retourne à ses gardes et papiers.

Je ne prends pas mal son air un peu désabusé: je ne prétends en mettre plein la vue à personne, et encore moins à lui qui doit en avoir vu d'autres qu'un Croisé encore -somme toute- débutant.
En revanche, ce que je prends mal, c'est qu'il me dise d'aller... me reposer.
Génial.

(Alors c'est ça l'aventure? Hé ben mon vieux... faut le temps de l'encaisser celle-là: je ne sais pas si je suis digne de cette tâche!)

Bon sang, je ne suis pas un imbécile: j'ai rationné mes forces. Je n'ai pas forcé l'allure, et j'étais très peu chargé, je suis au mieux de ma forme!
Mais bon, puisque M. Magicien veut que j'aille boire un bol de soupe et au dodo, autant faire ce qu'il me dit. Je ne suis pas là pour faire des vagues, et puis, à tout prendre, du repos ne peut me faire que du bien... après tout, il s'agit peut-être même d'un test: je me souviens d'une fois au Camp où une attaque avait été simulée pour tester notre réaction. En moins de cinq minutes, nous étions tous sur le pied de guerre!
Enfin bref: allons donc.

"Je tâcherai de remplir cette insigne tâche." je déclare d'un ton froid avant de franchir l'entrée sans lui accorder plus d'attention qu'il ne le fait.

--> Allées et habitations de Tory.

<-- Allées et habitations de Tory

Et voilà: à peine arrivé, on repart par où on est entré... enfin, pas vraiment, vu que je sors à l'exact opposé de là où je suis entré, mais bon, ça m'évitera d'avoir à subir potentiellement les récriminations de ce Mage casse-pied parce que je n'aurais pas attendu la suite de ses instructions à la mords-moi le nœud. Et puis, tant qu'à faire, je préfère reprendre la route plutôt que de rester à décrépir dans ce village: le frisson du combat, vous n'avez pas idée d'à quel point ça peut vous manquer!
Non pas que le village sente le moisi, mais niveau action, ça avoisine le 0 sur le baromètre évènementiel: y'a des rues, y'a des boutiques, et ça résume à peu près le tout. Je ne suis pas vraiment assoiffé d'aventures, mais je ne suis pas contre un peu de palpitant de temps à autre tout de même!

Allons, prenons notre mal en patience: je franchis justement les portes, faisant jaillir le paysage si familier au sein duquel j'ai circulé ces dernières années. Avec un soupir un peu las, je bourre ma sempiternelle pipe, compagne de de mes sempiternelles pérégrinations, à laquelle viendront désormais se joindre mon armure et mon épée, quoiqu'une de meilleure qualité serait préférable pour cette dernière.
Bref: j'allume la pipe susmentionnée, la cale dans ma bouche, et après en avoir tiré quelques bouffées, je salue les gardes en faction d'un hochement de tête auquel il répondent d'un air un peu distrait, puis je me mets en route sans destination particulière, me contentant de suivre le chemin qui défile sous mes pieds.

-->Vagabondage pour traquer des ténébreux tueurs